Le concept de ville ou région
apprenante[1] connaît presque la même vogue que
celui d'apprentissage tout au long de la vie. Les deux sont d'ailleurs apparus
sensiblement au même moment dans le débat public. Ils illustrent tous deux la
conviction, traduite en stratégies politiques publiques et privées, que
l'apprentissage constitue la condition incontournable du développement.
Les
deux notions sont complémentaires : alors que l'apprentissage tout au long de
la vie concerne l'individu, la ville ou région apprenante concerne le
collectif, la synergie des acteurs agissant sur un même territoire. Transformer
un territoire en ville ou région apprenante, c'est en somme fournir le plus
grand nombre d'opportunités à chacun d'apprendre tout au long de sa vie, pour développer
des activités économiques, culturelles et sociales au bénéfice de tous.
Les nouveaux territoires de transmissIon du savoir
Bien
qu'il soit relativement récent, le concept de «ville apprenante» se
trouve au cœur d'un nombre croissant de stratégies de développement
économique et il est plus que probable qu'il soit la caractéristique
première de la cité du futur et de son capital humain.
De la ville apprenante à la communauté d'apprentissage
On
comprend aisément que toute ville ou région désire désormais devenir «
apprenante », entrer dans l'économie de la connaissance et de l'innovation qui
caractérise la société post-industrielle, de manière à tenir sa place dans la
compétition mondiale et attirer les forces de production de biens et de
services sur son territoire. L'individu, de son côté, a tout à gagner à habiter
dans une ville ou région apprenante, pour y développer en permanence ses occasions
de formation qui garantiront sa valeur sur le marché de l'emploi d'une part, sa
place de citoyen à part entière dans l'espace public d'autre part.
Chaque
ville ou région dispose d'atouts spécifiques sur lesquels s'appuiera sa stratégie
de développement. C'est ce que décrit l'article de Kurt Larsen présenté sur le
site L'observateur de l'OCDE, à travers les exemples de régions allemandes,
scandinaves, françaises, espagnoles ou anglaises.
L'importance
du lieu tient à la proximité des acteurs qui l'habitent : « il y a beaucoup
d'avantages à opérer à l'intérieur de marchés du travail avec des limites géographiques
précises et à adhérer à un même ensemble de conventions, de valeurs et de
normes régionales ». Ceci, parce que les apprentissages porteurs d'innovation
s'effectuent le plus souvent de manière informelle, au fil des occasions de
rencontre et d'échange d'informations.
La réunion
d'acteurs unis par des valeurs, normes et conventions communes peut alors
donner naissance à des communautés d'apprentissage. C'est le postulat que développe
Ron Faris dans un remarquable numéro de la revue A lire en ligne, éditée par la
fédération canadienne pour l'alphabétisation en français (FCAF) : « La
communauté d'apprentissage (…) apparaît comme une unité fonctionnelle et
organique constituée d’un groupe structuré de personnes oeuvrant autour d’objectifs
et d’un projet communs, au coeur d’un processus éducatif permanent et
continuel, interpellant une responsabilité globale au sein de la communauté éducative.
La communauté d’apprentissage centrée sur le lieu, que ce soit une ville, un
village ou un quartier, est au centre du défi que pose le développement
(durable) de nos sociétés ». La communauté d'apprentissage soutient les
apprentissages individuels et collectifs, dans les cinq secteurs suivants :
1. le secteur civique ou de la
gouvernance;
2. le secteur économique (de l’entreprise
privée à l’entreprise d’économie sociale);
3. le secteur public (les bibliothèques,
les musées, les agences de santé et de services sociaux);
4. le secteur de l’éducation (de la
maternelle aux cycles supérieurs);
5. le secteur du bénévolat et de l’action
communautaire (groupes confessionnels, clubs philanthropiques, associations
récréatives et ludiques).
Sur
le même site, on trouvera un document fort intéressant montrant au travers d'un
tableau comment, dans chacun de ces cinq secteurs, apparaissent les différences
entre une démarche de ville apprenante et une démarche de ville traditionnelle.
Éducation : assurer le continuum
entre le formel et l'informel
On
constate que le secteur de l'éducation doit, comme les autres, opérer
d'importants changements pour intégrer une démarche globale d'apprenance généralisée.
Le secteur de l'éducation formelle doit nouer des liens avec celui de l'éducation
informelle, de manière à valoriser la globalité de l'apprentissage; il doit
donc établir des partenariats avec les autres secteurs de la société; il doit
s'intéresser à tous les publics, et pas seulement aux jeunes en formation
initiale; il doit aussi intégrer au quotidien des modes de construction des
apprentissages qui ne soient pas uniquement dictés par la tradition scolaire et
la valeur intrinsèque des savoirs tels que les a hiérarchisés l'école, mais qui
fournissent à chacun les outils nécessaires à l'apprentissage tout au long de
la vie.
Les TIC, pour relier la communauté d'apprentissage locale à la communauté mondiale
Le développement des usages des TIC
et de nouveaux services numériques tient une place privilégié dans la stratégie
des villes et régions apprenantes. Ceci, parce qu'elles permettent à la fois d'améliorer la
circulation et le partage des informations au sein des communautés
d'apprentissage et de relier cette dernière à la vaste communauté mondiale. De
plus, elles permettent de satisfaire les besoins d'un très grand nombre
d'apprenants. Il semble en effet illusoire de croire qu'une ville ou région
apprenante, aussi riche en opportunités d'apprentissage soit-elle, puisse répondre
en temps voulu à toutes les demandes d'apprentissage de toute une communauté
engagée dans la voie de la formation tout au long de la vie. Les TIC prendront
ici toute leur importance. C'est le point de vue que défend Norman Longworth
dans son excellent article Lifelong Learning, The Learning City and the
Learning Region publié sur le site britanique Longlearn.org.
Et
l'on conçoit bien alors que la communauté d'apprentissage locale soit reliée à
la communauté d'apprentissage mondiale, par le biais d'environnements
d'apprentissage territorialisés au plus près de l'apprenant, et passant
insensiblement dans la dimension virtuelle, comme le montre Ron Faris avec cette
représentation :
Villes
ou régions apprenantes ont donc tout à gagner à miser sur l'apprentissage pour
stimuler l'innovation dans tous les secteurs de la société, dans une
perspective globale de développement durable. De nombreuses villes se sont déjà
engagées dans cette voie qui réclame une vision à long terme, beaucoup d'énergie
et d'anticipation. A titre d'exemple et pour finir sur une note inspirante,
voyons ce qu'en disent les responsables du programme "Montréal, ville
apprenante, de savoir et d'innovation".
RD
"Villes apprenantes", la nouvelle recette du développement
régional. Kurt Larsen, L'observateur de l'OCDE.
Villes, villages et quartiers... Des lieux pour favoriser l'apprentissage.
Revue A Lire en ligne, FCAF, printemps 2010, téléchargeable en .pdf.
Vers une ville apprenante, un continuum (.pdf).
Site de la FCAF
Lifelong
Learning, The Learning City and the Learning Region Norman
Longworth, Longlearn.org.
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