Source : http://blog.transhumanistes.com/
Ainsi,
ce qui est en jeu dans l’aventure anthropotechnique, ce pourrait être ceci :
l’autonomisation du processus qui aboutit à l’émergence de la conscience par
rapport au processus biologique basé sur la chimie du carbone. Autrement dit,
les êtres dotés de conscience supérieure sont en train de concevoir un intérêt
à disposer un jour d’un corps/substrat dont le principe de fonctionnement ne
serait plus, ou majoritairement plus, celui du vivant tel que nous le
connaissons aujourd’hui. Conscience - Selçuk 2
Que
nous nous accordions ou non sur le primat du conscient sur le vivant, nous
pouvons sans doute nous mettre d’accord sur l’idée qu’un critère éthique absolu
pour nous permettre de dire ce que nous souhaitons permettre et ce que nous
souhaitons interdire dans notre évolution à venir est le critère de pérennité
(que d’autre appelle résilience, ou robustesse).
Ce
qui met en danger la survie et la poursuite de l’existence des individus (de
leur conscience et de l’espèce humaine) est à circonscrire, voire à prohiber
(hormis le libre choix individuel, conscient et éclairé, de mettre fin à ses
jours). Ce qui renforce et encourage notre capacité à survivre, en tant
qu’individus libres comme en tant que collectivité harmonieuse peut et doit
être permis et même développé.
La
difficulté réside bien entendu dans notre capacité à déterminer à l’avance ou
au moins à temps ce qui nous sera contraire et ce qui nous sera favorable. Et
ceci, d’autant plus que certaines dispositions peuvent se révéler bénéfiques
dans certaines conditions et désavantageuses dans d’autres (par exemple, la
capacité des cellules souches embryonnaires à se reproduire à l’infini semble
pouvoir déboucher sur des cancers, ou bien ce qui est considéré comme un
handicap mental (ex : l’autisme) peut, dans certaines circonstances être vécu
comme une marque de génie (ex : le syndrome d’Asperger). On pourrait multiplier
les exemples du même genre.
Il en
découle que, la plupart du temps, ce n’est qu’a posteriori que nous pouvons
juger si tel ou tel de nos choix éthiques s’est avéré judicieux. L’histoire ne
se répète jamais complètement mais je considère, avec la science, qu’il
n’existe guère de meilleure sagesse que de se baser sur le souvenir de nos
échecs et de nos réussites passées pour anticiper les conséquences de nos choix
à venir (d’ailleurs la logique du vivant n’est pas différente qui procède par
essais, erreurs, élimination des ratés et réutilisation des réussites).
Prendre le temps d’évoluer en
minimisant les risques d’échecs
Concernant
maintenant le choix d’utiliser et de développer telle ou telle nouvelle
technologie dans le sens d’une évolution de type transhumaniste, il devrait
donc en aller de même. Nous ne devrions avoir aucuns tabous, aucuns interdits
autres que ceux imposés par des échecs patents.
Cela
dit, il est évidemment impensable pour un transhumanisme techno-progressiste de
considérer les personnes humaines comme des objets d’essais susceptibles de
réussir ou d’échouer. C’est le libre choix, véritablement éclairé et
responsable, des individus qui doit être à l’origine des orientations
collectives.
Or,
Afin de parer au plus vite et au mieux aux dérives et aux ratés de nos choix
technologiques, une condition qui me paraît très importante est de se donner le
temps. Idéalement, nous devrions avoir le temps du choix, le temps de
l’expérimentation, le temps de l’appréciation, celui du plaisir aussi, le temps
du bilan puis, le temps de l’adoption ou celui du regret peut-être et de la
renonciation.
Contrairement
à certains – ceux qui rêvent de La grande catastrophe ou ceux qui attendent
déjà la Singularité - je pense en effet
que l’humanité a encore le temps devant elle et qu’elle doit le prendre.
Scientifiquement parlant, il semble que la seule échéance à ce jour inéluctable
pour l’aventure humaine soit la fin de vie du Soleil, ce qui nous donnerait
tout de même 4 ou 5 milliards d’années avant que le système solaire ne soit
plus vivable.
La
précipitation, au contraire, pourrait nous valoir un anéantissement avant ce
terme.
Le
danger donc, ne me paraît pas venir de l’adoption des technologies NBIC au
motif qu’elles ne pourraient que nous faire perdre notre humanité. En échange,
il me semble découler de cette logique de la précipitation dont se sert le
système sociétal et économique dominant aujourd’hui dans notre monde. Pour
parler grec, je pourrais m’amuser à considérer que cette précipitation relève
vraiment de l’hybris. Elle est une insulte au véritable dieu de la pensée
grecque : la raison humaine. Or, dans la tradition de la tragédie grecque,
l’hybris ne peut être que punie.
RD
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