Au
niveau économique, une baisse du niveau de vie des seniors est prévue d'ici à
2025. Elle devrait toutefois être relative et ce, pour deux raisons :
La première, est la décision prise, dans la
plupart des pays étudiés, de reculer l'âge de départ à la retraite, car il
devient, politiquement et financièrement, de plus en plus difficile de faire
supporter aux actifs le nombre toujours plus élevé d'inactifs. Ainsi, on peut
penser qu'une cessation d'activité de plus en plus tardive compensera, dans une
certaine mesure, la diminution du montant moyen des allocations retraite.
La deuxième raison est l'arrivée
des pensions de retraite propres aux femmes. En effet, l'émergence des couples
bi-pensionnés implique des revenus par foyer plus élevés qu'auparavant.
Cette
diminution attendue du niveau de revenus des seniors sera très inégalement répartie
en termes géographiques : baisse de 10 % aux États-Unis, et plus du double en
Allemagne, en Belgique et en France.
Par
contre, le Brésil et le Royaume-Uni se distingueront par une allocation
retraite moyenne qui devrait augmenter.
L'autonomie
des seniors, qui continueront à vivre de plus en plus longtemps à leur
domicile, va donc se renforcer. Si le net recul de l'hébergement chez les
enfants (-41 % d'ici à 2025) s'explique par leur éloignement, des conditions de
travail contraignantes et le coût des loyers ou des crédits, le conjoint et la
sphère familiale n'en restent pas moins, aujourd'hui, les intervenants majeurs
(73 % de l'aide apportée) quand un soutien se révèle nécessaire.
En
termes de lieux de vie, les populations de seniors des 11 pays étudiés
présentent une remarquable homogénéité : ils vivent, aujourd'hui, presque tous
chez eux ou dans leur famille.
Et
cette prééminence du domicile comme premier lieu de vie des seniors ne devrait
pas changer dans l'avenir.
Par
contre, l'hébergement dans la famille se réduira de façon considérable au
profit du maintien à domicile et d'un doublement de l'accueil des seniors en
résidences avec services.
Toutefois,
l'étude détaillée de leur habitat montre des tendances nationales qui reflètent
elles-mêmes des particularismes sociaux (culte de la famille dans les pays de
culture latine), géographiques (éparpillement et grandes distances pour les
États-Unis et le Canada) ou climatiques (Suède).
Ils
sont aussi suivis par les amis et le voisinage (12 %) et, dans une moindre
mesure, par les services publics (6 %) et privés (5 %).
Ce
qui signifie que, si l'univers des seniors repose essentiellement sur
l'autonomie, la solidarité n'en est pas absente, loin de là. Mais cette
solidarité prend des formes très différentes selon les pays.
Le
senior brésilien peut compter sur ses enfants, tout comme l'espagnol, car il
existe au Brésil et en Espagne une culture familiale intergénérationnelle
forte.
À
l'inverse, les seniors canadiens, belges ou suédois comptent davantage sur les
aides publiques ou privées, voire sur les organismes bénévoles qui compensent
une relative désaffection des enfants.
Autre
constatation : le poids du conjoint dans les cultures allemande et anglo-saxonne
est important, alors qu'il l'est moins ailleurs. Ainsi peut-on ébaucher, pays
par pays, des scénarios de réponse à la question que tout senior se pose tôt ou
tard : qui va m'aider ?
Les
seniors de l'an 2000 feront plus librement le choix de leur habitat, de leurs
activités et de leurs fréquentations. Et surtout, ils auront les moyens
matériels et intellectuels de les imposer.
Ils
seront ainsi des interlocuteurs responsables et exigeants : les offres d'aide
et de services qui leur seront proposées devront être élaborées spécifiquement
pour eux et avec leur plein accord.
Les
seniors attendent qu'on leur propose demain des lieux de vie qui soient aussi
des lieux de soins et non l'inverse. Ceci implique l'émergence d'une offre
hôtelière plutôt qu'hospitalière à destination des Fragiles et surtout des
Dépendants. Et celle-ci doit intégrer la mise en place d'une palette de
services personnalisés.
Toutefois,
la proximité et la "taille humaine" des structures s'avéreront essentielles.
Demain, par exemple, au sein des villes, des "pools" de services
communs pourront être mis en place. Ils permettront aux seniors habitant à
proximité de se retrouver.
Or,
puisque les seniors resteront chez eux de plus en plus longtemps, les services
à domicile sont promis à une expansion importante. Mais ils ne pourront se
développer réellement que s'ils sont, avant tout, un moyen de simplifier le
quotidien et non une réaction « technique » à une obligation d'ordre médical.
L'offre proposée devra faciliter l'intégration souhaitée par les seniors.
Dans
ce cadre, l'existence d'un personnel nombreux, doté de réelles qualités
relationnelles et formé à l'écoute spécifique des seniors, deviendra
essentielle pour répondre aux besoins croissants d'intégration sociale des
seniors.
Demain,
plus encore qu'aujourd'hui, le soutien moral et les services aux seniors
nécessiteront de véritables compétences professionnelles. Car les accueillants
et les aidants vont se raréfier : l'augmentation du nombre des femmes qui
travaillent, ainsi que la dispersion et la mobilité géographique des familles
impliquent que ceux qui ne peuvent plus bouger aient de plus en plus recours à
des structures professionnalisées.
Il
y a donc là, un enjeu essentiel : compléter les services aux aidants, en
créant, par exemple, des centres de jour, de véritables « crèches seniors »
afin d'alléger le travail des familles. Mais cette nouvelle offre, tout comme
l'ensemble des produits et services proposés aux seniors et à leurs aidants, devra
se présenter comme une offre de services "pour tous" afin de
s'adapter à la formidable banalisation des modes de vie de cette population.
Ne l'oublions pas, les seniors seront
demain au centre de nos sociétés. En cela, le "Power Age" qui
s'annonce est une révolution pour le présent et un défi pour l'avenir.
RD